Article publié par Me JP. VERGAUWE dans le Journal de l'Architecte du mois d'octobre 2007
Dans notre précédente chronique nous avons commenté la loi du 15 février 2006 dite « loi LARUELLE » qui, sous certaines conditions, autorise désormais l’exercice de la profession d’architecte aux personnes morales disposant de la personnalité juridique et qui, comme telles, peuvent être inscrites à l’Ordre des Architectes.
L’Ordre a adopté le 27 avril 2007 une recommandation qui concerne l’exercice de la profession d’architecte par une personne morale.
Le règlement de déontologie, approuvé par l’Arrêté Royal du 18 avril 1985, permettait « l’exercice de la profession d’architecte dans le cadre d’une association ou d’une société civile professionnelle » aux conditions indiquées à l’article 5 dudit règlement et suivant les prescriptions de la recommandation du 28 novembre 1997 relative à l’exercice de la profession dans le cadre d’une société ou d’une association.
Cette ancienne recommandation n’est pas abrogée ; elle continuera à s’appliquer à toute société ou association d’architectes qui ne répondent pas à la définition et aux conditions de la loi LARUELLE.
Ces sociétés, dont l’objet social est « l’exercice par les associés pour compte de la société de la profession d’architecte » ne sont pas comme telles titularisées, c’est-à-dire inscrites à l’Ordre. Seuls les associés exercent la profession d’architecte et assument les responsabilités découlant de cet exercice.
Les sociétés constituées conformément à la loi LARUELLE devront, quant à elles, respecter la nouvelle recommandation du 27 avril 2007.
Celle-ci comporte tout d’abord une série de définitions figurant à l’article 1 (terminologie).
L’article 2 définit le champ d’application de la recommandation qui s’applique « à tous les architectes-personnes morales, qui exercent ou souhaitent exercer la profession d’architecte en Belgique ainsi qu’à leurs architectes associés » ; comme rappelé ci-avant cette recommandation ne s’applique donc pas aux sociétés ou association d’architectes qui, quoique parfaitement licites, ne répondent pas aux conditions de la loi LARUELLE.
Les principales dispositions de la recommandation du 27 avril 2007 peuvent être résumées comme suit :
1° Conseil provincial compétent
Le Conseil de l’Ordre des architectes de la province dans laquelle est établi le siège social de la personne morale est compétent pour exercer sa juridiction sur la société d’architectes ; le Conseil provincial compétent exerce plusieurs contrôles et notamment :
- Toutes les formalités concernant la constitution et l’inscription de l’architecte- personne morale, ainsi que la déclaration de nouveaux actionnaires et les modifications des statuts (article 3) ; l’article 12 définit les modalités d’approbation de la constitution et des modifications statutaires. On rappellera que chaque projet de statuts ou de modification doit être préalablement soumis à l’approbation du Conseil provincial compétent (article 12.1).
- Le Conseil doit examiner le projet dans les trois mois de la réception (article 12.3) et la personne morale ne pourra être inscrite au tableau qu’après avoir fourni au Conseil provincial compétent la preuve du dépôt de l’acte constitutif ou de l’acte modificatif au greffe du tribunal de commerce compétent (article 12.4).
Obligation de signaler au Conseil de l’Ordre les personnes physiques ou morales qui exercent une profession non incompatible avec la profession d’architecte et qui détiennent les parts ou actions (au maximum 40%), conformément à l’article 2 §2 4° de la loi du 20 février 1939 rappelé par l’article 8.1.1. de la recommandation.
- Faculté pour le Conseil de l’Ordre de consulter le registre des parts sur simple demande, conformément à l’article 9.1.
- Soumission préalable à l’approbation du Conseil provincial compétent de tout projet de transmission d’actions, de démembrement du droit de propriété des actions en usufruit et nue-propriété ou d’admission de nouveaux associés (article 9.3.).
- Signalement sans délai au Conseil provincial du déplacement du siège social, de même que l’établissement d’un ou plusieurs sièges d’exploitation supplémentaires (article 3.2.)
2° Respect de la déontologie
L’article 4 de la recommandation précise que les statuts doivent « explicitement prévoir que la loi du 20 février 1939, la loi du 26 juin 1963 et la déontologie de la profession d’architecte doivent être respectées, tant par l’architecte-personne morale que par tous les associés ». Cette mention doit obligatoirement figurer dans les statuts, de même que la mention explicite que les statuts doivent être interprétés en conformité avec la déontologie ; les statuts ne peuvent d’ailleurs contenir aucune disposition contraire à la déontologie.
3° Forme juridique
L’article 5 concerne la forme juridique de l’architecte-personne morale qui doit être constituée en société civile avec personnalité juridique et doit répondre à la loi du 20 février 1939, telle que modifiée par la loi LARUELLE et aux règles précisées à l’article 5.
Seules les sociétés à forme commerciale, organisées par le Code des sociétés, sont admises quoique la profession d’architecte reste de nature civile.
4° Dénomination et / ou logo
L’article 6 concerne la dénomination et / ou le logo.
Mentionnons à cet égard que la dénomination de la personne morale doit au moins comprendre le mot architecte suivi de la forme adoptée et précédée ou suivie de « société civile ».
5° Objet social
L’article 7 concerne l’objet social et les activités de la personne morale qui doivent être limitées aux prestations de services relevant de l’exercice de la profession d’architecte et ne peuvent être incompatibles avec celle-ci.
6° Actionnaires
L’article 8 contient de nombreuses dispositions relatives aux actionnaires ; le nombre d’associés est illimité.
L’article 8.1.1. rappelle l’article 2 §2, 4° de la loi du 20 février 1939, modifié par la loi LARUELLE (au moins 60% des parts ou actions ainsi que des droits de vote doivent être détenus par des personnes physiques autorisées à exercer la profession d’architecte, les autres parts ou actions ne peuvent être détenues que par des personnes physiques ou morales qui exercent une profession non incompatible.
L’article 8.1.3. vise les situations où les actions ou parts sont divisées en usufruit et nue-propriété, en distinguant à cet égard les actions d’architectes et les autres actions.
Les personnes morales ne peuvent être associées que pour autant qu’elles aient un objet social non incompatible avec l’objet social de l’architecte-personne morale.
7° Actions
L’article 9 concerne les actions qui doivent toujours être nominatives.
L’article 9.2. précise que les nouveaux associés ne peuvent être admis que « moyennant l’accord de la moitié des associés représentant en outre les ¾ des actions d’architecte ».
Naturellement les statuts peuvent se montrer plus restrictifs et prévoir, par exemple, que l’accord de l’unanimité des associés est requis pour l’admission de nouveaux membres.
L’article 9.3. concerne la cession des actions ou parts ; les statuts doivent contenir, obligatoirement un règlement relatif à la cession d’actions.
8° Administration – gestion et dissolution
L’article 10 de la recommandation concerne l’administration, la gestion et la dissolution de la société.
L’article 2 §2, 1° de la loi du 20 février 1939 rappelé par l’article 10.1. de la recommandation impose que tout gérant ou administrateur, membres du comité de direction et de manière générale tous les mandataires indépendants qui interviennent au nom et pour compte de la société doivent être des architectes-personnes physiques autorisés à exercer la profession et inscrites au tableau de l’Ordre.
On notera également que chaque architecte associé peut convoquer une assemblée générale dont il fixe lui-même l’ordre du jour (article 10.2.2.) et que l’assemblée générale est compétente concernant la nomination et la démission des administrateurs et gérants, leur rémunération et la durée de leur mandat, ainsi que pour exclure un architecte associé.
9° Intérêt des tiers
L’article 10.3. rappelle qu’en cas de dissolution les dispositions nécessaires doivent être prises pour assurer les intérêts des clients, notamment en ce qui concerne la poursuite des contrats d’architecture et des missions en cours.
Cette question revêt une importance fondamentale ; les associés, en effet, doivent déterminer la procédure à suivre pour la poursuite des contrats d’architecture et des missions en cours lorsque la société est dissoute ; naturellement ces dispositions doivent respecter la liberté du maître de l’ouvrage de confier la mission architecturale à l’architecte de son choix.
De même, les statuts contiendront les dispositions nécessaires afin de préserver les intérêts des maîtres de l’ouvrage en cas de retrait, démission, exclusion, absence, incapacité, indisponibilité en général et en particulier en cas de sanction disciplinaire de suspension ou de radiation d’un architecte associé, de l’architecte-personne morale lui-même ou de ses gérants, administrateurs, etc… (article 11).
Les statuts doivent déterminer la procédure à suivre pour les contrats en cours lorsque la personne morale cesse d’exister (article 11.2).
10° Personne morale en formation
L’article 13 contient une disposition particulière lorsqu’un architecte-personne physique, conclut un contrat au nom d’un architecte-personne morale en formation, particulièrement en ce qui concerne la couverture dans le temps de la responsabilité professionnelle par une police d’assurance (article 13).
Telles sont les principales dispositions de la recommandation du 27 avril 2007 que le lecteur intéressé est invité à lire dans son intégralité, puisque la présente chronique en a esquissé les principales dispositions et lignes directrices, sans exhaustivité.